A Barcelone, grimoires et parchemins ressuscités


Texture, odeur… L’éditeur Moleiro reproduit dansle détail les trésors cachés des bibliothèques

Comme toutes les grandes aventures, l’histoire de la maison Moleiro, installée à Barcelone et spécialisée dans la reproduction de manuscrits enluminés rares, de cartes et d’atlas peints entre les VIIIe et XVIe siècles, pourrait bien commencer par « Il était une fois… ». Sauf qu’il ne s’agit pas d’un « songe d’une nuit d’été », ironise Manuel Moleiro, mais de la consécration d’une passion pour l’édition et l’histoire de l’art.

Sitôt la fin de la dictature franquiste, Manuel Moleiro le Galicien a pris le chemin de la Catalogne pour y étudier journalisme et édition d’art. C’est là qu’il décide de se lancer dans la réalisation de facsimilés de documents dont les originaux sont gardés précieusement dans les bibliothèques et institutions les plus réputées du monde. Vingt ans après, Moleiro peut être fier d’un succès qui doit beaucoup à son opiniâtreté.

C’est par exemple ainsi qu’après de longues années d’efforts et beaucoup d’arguments il est parvenu à faire « sortir » de la Bibliothèque nationale de France (BNF) quelques volumes de valeur comme les Grandes Heures d’Anne de Bretagne ou le Livre du bonheur. Dans le premier, considéré comme le plus important herbier de la Renaissance, figure plus de 300 images peintes de plantes existant en France en 1500. On y voit notamment pour la première fois l’image d’un potiron, cucurbitacée provenant d’Amérique, et qui vient tout juste d’être introduit en France. Pour le Livre du bonheur, six années de discussionsfurent nécessairesà l’éditeur espagnol pour convaincre les responsables de la section des manuscrits de l’islam de la BNF de lui confier ce livre réalisé au XVIe siècle par le sultan Mourad III, sans doute l’un des plus raffinés de l’Empire ottoman, rapporté par Napoléon de sa campagne d’Egypte.

Parfois, c’est grâce à des passionnés bibliophiles que des ouvrages sont redécouverts et imprimés. Ainsi en est-il du Livre des simples médecines conservé à la Bibliothèque nationale de Russie à Saint- Pétersbourg, du Livre d’heures de Charles VIII dont un unique exemplaire se trouvait dans celle de Madrid, ou encore de la Bible de Saint Louis qu’il n’était possible de consulter que dans deux bibliothèques, celle de la Sainte Eglise Cathédrale Primatiale à Tolède et à la Pierpont Morgan Library à New York.

Ces ouvrages qui, pendant des siècles, n’ont été à la portée que d’un nombre infime de personnes, en raison de leurs strictes conditions de conservation, sont réédités comme des « presque originaux », tous les moyens techniques étant mis en oeuvre pour reproduire la texture, l’odeur, l’épaisseur, la densité des papiers et des parchemins, l’ordes enluminures, les peaux des reliures, les fils de couture…

Ce sont bien ici les prouesses techniques de reproduction qui retiennent, autantquele choixdes documents, l’attention. Les différentes étapes de la réalisation font coexister des techniques ultramodernes avec des savoir-faire ancestraux. En édition limitée, ces ouvrages–qui requièrent au minimum deux ans de travail – ne sont évidemment pas à la portée de toutes les bourses.

Mélina Gazsi

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